Mal soignée, pas respectée : que puis-je faire ?
Je n’ai pas compris pourquoi j’ai eu une épisiotomie. Que puis-je faire ?
En parler directement
En premier, vous pouvez demander à en parler directement avec l’équipe médicale.
Consulter votre dossier médical, sur place ou chez vous, seule ou accompagnée
Vous pouvez aussi demander votre dossier médical. Dans ce cas, vous pouvez soit le consulter sur place, éventuellement accompagnée d’un professionnel de santé de la maternité, soit vous le faire envoyer. Si vous vous le faites envoyer, vous pourrez éventuellement le lire avec l’aide d’un professionnel de santé de votre choix, ou demander l’aide d’une association de patients.
Comment demander son dossier médical ?
Consultez par exemple les fiches pratiques du CISS, un collectif d’associations de patients : Accès au dossier médical et aux données de santé ; Lettres type de demande de dossier médical ; Quels recours face au refus d’accès aux données médicales.
Il peut être utile de préciser que vous souhaitez une copie des courbes de monitoring.
J’ai mal vécu mon accouchement avec épisiotomie, que puis-je faire ?
En parler, consulter son dossier
Vous pouvez là encore en parler directement avec l’équipe médicale ou accéder à votre dossier, seule ou accompagnée (voir ci-dessus). Mais aussi, vous pouvez en parler avec d’autres professionnels de santé, avec d’autres femmes qui ont été dans la même situation, avec des membres d’associations de parents…
Souffrances psychologiques
Par ce site, nous avons rencontré des femmes en réelle souffrance psychologique, voire en situation de stress post traumatique. Nous les avons écoutées, soutenues, et parfois les avons encouragées à se faire aider par des professionnels compétents.
Signalons aussi une association non médicale de soutien, d’écoute et de conseils sur la difficulté maternelle, Maman Blues.
Une dernière chose : oui, les violences obstétricales peuvent être considérées comme des viols. Si vous le ressentez ainsi, votre ressenti est légitime et est partagé par d’autres femmes.
Souffrances physiques
Les complications des épisiotomies, des déchirures, doivent être prises au sérieux et traitées. Certaines femmes ont dû consulter plusieurs établissements, plusieurs obstétriciens, pour être prises en charge de façon suivie et cohérente.
Les douleurs pendant les rapports sexuels font partie de ces complications. Elles doivent être reconnues, et traitées comme telles. Certaines femmes qui en souffraient se sont entendues conseiller de se forcer, sous prétexte que ce serait psychologique. Vous n’avez pas à accepter de telles réponses.
J’ai subi une épisiotomie sans en être informée, ou sans qu’on m’ait demandé mon consentement, ou malgré mon refus, que puis-je faire ?
Il s’agit d’une violation des droits des patients. Mais que faire si cela vous arrive ? Chaque situation est unique, nous ne proposons pas de recette, mais des mots clefs : se réparer, dialoguer, militer.
Se réparer, dialoguer, militer
Se réparer, car si on exprime qu’il y a eu manquement à l’information ou à la demande du consentement, c’est souvent parce que cela génère une souffrance. Il y a priorité à se réparer soi-même.
Dialoguer avec les professionnels de santé, avec l’établissement, car cela peut être une étape nécessaire à sa propre réparation, et parce qu’il s’agit d’une amorce d’action militante : en expliquant leur ressenti, les femmes peuvent faire prendre conscience aux professionnels de l’impact de leurs attitudes sur les patients.
Militer, pour que cela n’arrive plus aux femmes.
Besoin d’un cadre formel pour engager le dialogue et demander des explications ?
En France, il est possible de saisir la Commission de relation avec les usagers (CRUQ) dans chaque établissement de santé. Cela permet d’avoir un cadre officiel à la demande d’explication, avec l’implication d’un médiateur.
Nous conseillons aux personnes souhaitant saisir la CRUQ de contacter une association d’usagers de la périnatalité et de se faire accompagner pour les démarches.
Voir la fiche du CISS sur la Commission des relations avec les usagers et de la qualité de la prise en charge – son rôle dans l’examen des plaintes
Voir la page du Ciane sur les CRUQ (ou CRU)
Que peut faire la justice ?
Nous considérons comme des droits fondamentaux notre droit à l’information, à la demande et au respect du consentement. Les législations nationales et internationales vont dans ce sens, voir notre page Ce que disent les textes.
La voie de la justice peut-elle être explorée dans les cas de non-respect de ces droits ?
Nous considérons qu’il est délicat pour l’instant d’aborder la question de l’information et consentement sous l’angle juridique, pour ce que nous connaissons de la jurisprudence en France
- le défaut d’information n’était pas considéré comme un préjudice en soi jusqu’à récemment ; la jurisprudence évolue, avec des avancées et des revirements : le sujet est donc à surveiller.
- le préjudice pour défaut de consentement à un acte médical, nous semble pas avoir fait l’objet d’une jurisprudence.
Nous n’avons pas de synthèse sur l’état de la jurisprudence dans d’autre pays. A notre connaissance il y aurait une affaire en cours à la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) concernant une épisiotomie.
Cette mise au point date de 2014. Voir jurisprudence et bibliographie en fin de cette page.
J’ai subi une épisiotomie que je considère comme abusive, qui puis-je faire ?
Nous suggérons en priorité de demander son dossier et d’engager le dialogue avec l’équipe médicale, éventuellement de saisir la CRUQ. Voir plus haut.
L’épisiotomie pratiquée sans indication prouvée est, pour nous, une mauvaise pratique médicale. Nous considérons que les femmes qui en sont victimes n’ont pas bénéficié des soins les plus appropriés. Voir notre page Ce que disent les textes
Pourtant, là encore, nous ne connaissons pas en France de poursuites juridiques qui aient abouti à reconnaître le caractère abusif de la réalisation d’une épisiotomie, avec ou sans séquelles.
J’ai fait face à des complications graves d’une épisiotomie : impact sur ma vie personnelle, professionnelle, sexuelle… Puis-je demander réparation financière ?
Oui. On entre là dans le cadre de la réparation d’un accident médical.
Les démarches consistent à saisir les Commissions régionales de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux (CRCI) ou les tribunaux. Voir la fiche du CISS sur les CRCI.
Les associations de patients « généralistes » (non spécialisées en périnatalité) comme le CISS ou l’AVIAM sont à même de vous conseiller et vous accompagner dans ces démarches.
Jurisprudence
Cour de Cassation (secteur privé)
1) Arrêt de la Cour de Cassation du 3 juin 2010
L’arrêt et un article qui l’explique
2) Arrêt de la Cour de cassation, 12 janvier 2012
3) Arrêt de la cour de Cassation du 12 juin 2012 sur information sur prescription hors Autorisation de mise sur le marché
4) Arrêt de Cour de Cassation, 23 janvier 2014 (revirement de la jurisprudence)
Conseil d’Etat (secteur public)
1) 10 octobre 2012 (manquement à l’information)
Article dans la Revue générale du droit
Article dans l’actu étudiant Dalloz
Bibliographie
1.Haboubi, C. Autonomie de la personne et consentement en droit européen. Droit, Déontologie & Soin 10, 370 – 381 (2010).
2.Safar, S. H. Information du patient : recommandation de bonne pratique de l’HAS de mai 2012 et jurisprudence de référence. Droit, Déontologie & Soin 12, 445 – 459 (2012).
3.Badiane Devers, K. Une décision de justice pas à pas. Obligation d’information et préjudice. Droit, Déontologie & Soin 12, 144 – 151 (2012).
4.Devers, K. B. Une décision de justice pas-à-pas. Manquement au devoir d’information, faute de diagnostic et faute de technique médicale causant une perte de chance. Droit, Déontologie & Soin 13, 35 – 41 (2013).
5.Modalités, preuve et contenu de l’information que le médecin doit donner à son patient. Médecine & Droit 2010, 36 – 38 (2010).
6.Vialla, F. Comparaison des jurisprudences rendues en matière de responsabilité pour défaut d’information. Médecine & Droit 2013, 57 – 64 (2013).
7.Devers, K. B. Une décision de justice pas à pas. Défaut d’information, accident médical et indemnisation. Droit, Déontologie & Soin 13, 492 – 500 (2013).
8.Bronkhorst, A. Défaut d’information préalable pour une ligature des trompes et une intervention esthétique. Droit, Déontologie & Soin 13, 354 – 357 (2013).
9.Adergal, A. Consentement médical : enfin un accord sur l’indemnisation d’un préjudice moral ! Droit, Déontologie & Soin 13, 16 – 24 (2013).
10.Pierre, P. La réparation du manquement à l’information médicale : d’une indemnisation corporalisée à la mise en œuvre d’un droit créance. Médecine & Droit 2011, 107 – 113 (2011).
11.Laude, A. Le droit à l’information du malade. Les Tribunes de la santé 9, 43 (2005).
12.Vialla, F., Périer-Chapeau, S. & Reynier, M. Un pas supplémentaire vers l’autonomie de la réparation du défaut d’information médicale ! Médecine & Droit 2012, 170 – 175 (2012).
13.Vialla, F. Évolutions récentes de la responsabilité pour défaut d’information. Médecine & Droit 2010, 161 – 170 (2010).
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