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publié le 9 janv. 2010
Ce sont des femmes, des sages femmes, mais aussi des femmes sages … leur discours est différent de nombre de sages femmes, de nombre de professionnels de la naissance. A les écouter, on aurait aimé qu’elles soient là pour notre accouchement.
Cet article n’est pas figé, définitif …au fil du temps, viendront s’ajouter d’autres remarques, paroles, interventions de sages femmes ….
Le périnée ….
Le périnée, cette région de notre corps si importante, et si négligée jusqu’au moment de la grossesse, de l’accouchement … où d’un coup, il faut le préserver, le protéger … en le coupant ! ! ! c’est ubuesque … Ecoutons ces discours tout à fait intéressants et novateurs sur la question.
Quelques mots donc sur le périnée, sa musculature, l’épisiotomie et la rééducation périnéale …
STEPHANIE :
J’ai reçu une formation tout a fait intéressante sur le sujet, certaines d’entre vous ont d’ailleurs reçu ce type de “rééducation”, c’est Connaissance et Maîtrise du Périnée, avec Dominique Trinh Dinh.
Après cela, je pense que quand on dit qu’un périnée est trop tonique, c’est en réalité que, à cause de la souffrance ou de mauvaises habitudes de vie, ces muscles sont dans une contracture permanente. Leur amplitude de mouvement est donc très limitée: je veux dire, un muscle déjà à moitié contracté par exemple le cas du biceps quand l’avant bras est a moitié fléchi sur le bras, peut fournir un certain effort, ici représenté par le mouvement de l’avant bras de quelques cms. Si au contraire ce même muscle est complètement détendu, (bras tendu) l’amplitude du déplacement de l’avant bras est évidemment bien plus importante. Et c’est pareil pour le périnée : s’il est toujours plus ou moins contracté, il ne peut pas fonctionner correctement et jouer son rôle a fond. C’est certainement ce qui se passe quand on fait de la rééducation sans respecter les interactions des différents muscles entre eux : on privilégie tel ou tel groupe de muscles au détriment d’autres (sonde si on ne fait que ça). Après on a l’impression de “vagin rétréci” ou de sécheresse vaginale, on a des douleurs profondes pendant les rapports etc…
Mais je suis persuadée que tout ceci, nos mauvaises habitudes de vie, les mauvaises rééducations, les épisiotomies, tout peut, avec plus ou moins d’efficacité, se remodeler, se réparer, avec le temps et l’exercice, les massages, etc…
DELPHINE :
Je ne crois pas qu’un périnée puisse être trop musclé, mais que la rééducation n’ait intéressé que des muscles superficiels et non profonds, oui, peut être. Mais attention, ce n’est pas irréversible!!
Il existe des bouquins très bien sur le sujet du périnée!!!! 😉
Je crois que les questions à se poser sont :
Qui a prescrit la rééducation? Sur quels critères ? Et qui l’a faite? Sur quels critères?
Et aujourd’hui, comment te sers-tu de ton périnée en dehors de la sexualité ?
Le périnée est le plancher de notre abdomen féminin, c’est notre base. Il doit être protégé à chaque fois qu’on le sollicite, exemple : nous sommes une famille “à éternuements matinaux “, donc avant d’éternuer, il faut veiller au maximum à contracter le périnée qui va être violemment sollicité par l’éternuement, on le sait quand on a des pertes d’urines quand on éternue.
Nous, femmes occidentales, on se tient très mal au quotidien, et tout est fait pour que ça dure, les chaises trop inclinées, les conduites obstétricales inappropriées, la méconnaissance de son corps …
Pourquoi ne pas accepter ce périnée tel qu’il est et lui faire confiance? Se le réapproprier doucement ?
Les éraillures ….
Les éraillures, très fréquentes au cours de l’accouchement, correspondent à une grosse égratignure. La peau est arrachée, la muqueuse à vif … que faire ? suturer ou pas ?
DELPHINE :
Doivent elles toujours être reprises ? De plus en plus, je demande aux dames de me décrire ce qu’elles sentent, si, après le passage du bébé et du placenta, ça continue à brûler. Bien souvent, lors d’une déchirure, une fois que le temps a repris son cours après une naissance, que parents et enfant se regardent, ça ne brûle plus. En accord avec elles, si elles se sentent bien, je ne suture pas. Je me “couvre” lâchement du médico légal en parlant sincèrement, et dans les yeux, et en soulignant que je ne le fais pas au prix, mais c’est évident et ce n’est pas un manque de considération de ma part, d’une hygiène rigoureuse. Je suis obligée de le spécifier pour être en accord avec ce que je vais noter dans le dossier, le sacro saint dossier. Du coup, je ne suture plus des masses.
STEPHANIE :
A propos des éraillures, moi je ne suture que quand ça saigne même quand j ai un peu “appuyé” dessus pour faire hémostase. Si ça continue de saigner, j ai peur que la perte de sang, petit à petit soit assez importante, on en a assez perdu comme ça, pas la peine de “gâcher” pour une petite éraillure. Si après avoir un peu appuyé dessus ça ne saigne plus, je ne suture pas. C est vrai que ça brûle un peu, mais il parait que les fils sur la muqueuse sont tout aussi douloureux quand ça cicatrise. Et en plus c’ est difficile à anesthésier !
Du coup, je ne suture plus des masses non plus.
DELPHINE :
Par deux fois, des femmes que j’avais accompagnées et pas suturées se sont plaintes de douleurs le lendemain de la naissance, et ont été suturées par des collègues, sous locale. Quand je les ai revues, elles n’ont pas eu un discours accusateur, ne m’ont rien reproché, mais peut-être surtout qu’elles n’ont pas voulu me parler de ça ? Moi ça m’a mise mal à l’aise bien sûr, c’est hautement désagréable d’y retourner pour les femmes, et je me fais toute petite. J’apprends de mes erreurs. La dernière était en janvier 2005. Que ça brûle en urinant, j’ai envie de dire que c’est courant, atrocement, parfois. Que ça brûle moins avec des points? Parfois, pas toujours, je pense. Il me semble qu’il faut du cas par cas, et, ma foi, aujourd’hui je privilégie le dialogue et la confiance mutuelle, si nous sommes d’accord pour ne pas suturer, cela induit, et je le spécifie avec les femmes, que je leur fais confiance pour me dire si, finalement, ça brûle trop, peut-être y a‑t-il besoin de points. Cas par cas.
L’anesthésie indispensable pour la suture d’épisiotomie ou de déchirure …
DELPHINE :
La peau est plus difficilement anesthésiée, c’est vrai, en fait, le vagin est quasi insensible aux piqûres de l’aiguille car endolori entre guillemets par le passage du bébé (je n’ai pas dit qu’il était insensible aux touchers et écartements des doigts). La peau doit être correctement anesthésiée par le produit, pour ça il faut laisser du temps pour que ça agisse, et, il me semble, ne pas traiter une suture périnéale comme une suture du bras, respecter douceur des gestes, et regards, explications, dialogue. Mais on peut évidemment anesthésier la peau, parfois, à 3h du mat, avec vraisemblablement moins de patience, mais ça n’excuse rien.
STEPHANIE :
A propos de l’injection d’anesthésique local avant suture, injection qui est (parfois, très rarement) éminemment douloureuse, et d’une technique peu courante d’analgésie
j’ai déjà fait des anesthésies locales qui “brûlaient” un peu mais sans plus, en tout cas ça a toujours été moins douloureux que la suture elle même. Peut être effectivement que si on pique sur le trajet d’ un nerf ça doit faire mal, mais cela ne m’est jamais arrivé.
Quelquefois, et même d’ailleurs pendant l’expulsion, je fais un “bloc honteux”, c’est à dire une anesthésie des “nerfs honteux” (c’est leur nom), qui consiste en une injection au niveau des épines sciatiques (les deux pointes d’os sur lesquelles on est assise) Si on attend 5 à 10 minutes, on est vraiment soulagée, et le spray peut suffire à compléter l’anesthésie.
Pendant l’expulsion, c’est utile pour celles que la brûlure de l’ampliation du périnée est insupportable et qui donc se “retiennent” de pousser par crainte de cette douleur. Le bloc honteux n’ endort pas complètement, les sensations sont intactes, mais la douleur atténuée, nombre de femmes ont été ravies du résultat. (je leur demande avant / pendant le travail et encore une fois avant de le faire)
Cette technique m’ a été apprise par un vieux de la vieille à la retraite, qui a travaillé avant la péridurale…
Les suites douloureuses, la cicatrisation psychologique et physique …
C’est un sujet dont on parle peu, dont on ne parle pas … et pourtant …
STEPHANIE :
Je refuse de croire que la douleur et l’inconfort sont définitifs.
Je crois qu’il faut trouver la bonne personne, celle qui va réussir à nous guider correctement pour nous permettre de trouver chacune le bon chemin. C’est le but de la formation de rééducation que j’ai suivi : faire trouver a chacune la bonne méthode, celle qui va convenir de façon individuelle et pour le reste de la vie. C’est plus une méthode ” d’éducation” plutôt que de “rééducation”, rééduquer ça veut dire “remettre dans le droit chemin” comme si tout le monde devait marcher dans les mêmes pas que les autres. Chacune doit pouvoir trouver sa propre voie et finalement s’éduquer toute seule.
Je crois fermement dans les possibilités de récupération du corps et aussi de l’esprit. On a toutes des couronnes dentaires qui ont fait mal au début, des cicatrices de chutes, des ongles qui sont tombés a cause de chaussures mal adaptées (genre pendant une randonnée au volcan…), ce genre de choses. Et bien, on vit avec, c’est a dire qu’on n’est pas fataliste en disant “c’est comme ça, il faut souffrir”, mais plutôt on est allé voir tel ou tel spécialiste qui a soulagé la douleur et fait qu’on peut aujourd’hui vivre avec ce petit “défaut” ou cette petite “faiblesse” tous les jours sans que ça nous gâche la vie.
A propos du périnée c’est encore pire : c’est beaucoup trop intime et personnel pour qu’on se laisse aller et qu’on accepte que ce petit coup de ciseau nous pompe l’air même pendant les rapports sexuels, c’est à dire dans le plus intime des intimes !
Je crois aussi qu’il faut se laisser une “deuxième chance”, on peut se réparer d’un premier accouchement mal vécu avec le deuxième. Une patiente me disait d’ailleurs “votre deuxième vous guérira du premier”… Moi qui n’ai eu que la moitié de la grossesse (5 mois et demi), je suis frustrée et en colère, j’ai été en grande souffrance, à cause de cette prématurité. J’ai beaucoup réparé avec l’allaitement, pendant plus d’un an. Une fois que la souffrance et la colère, l’injustice, s’estompent un peu, on peut avancer et incorporer cet événement et cette cicatrice, pour que ça fasse partie de soi et de son histoire, de son expérience personnelle, qui fait que l’on est ce que l’on est.
La réparation et le mieux être passe forcément par la reconnaissance de la souffrance et par la démarche de la consultation de spécialiste, de la mise en place d un traitement, de la rééducation, pourquoi pas d’ une chirurgie réparatrice, etc…
Et puis la prochaine fois, on ne se laissera pas avoir par les arguments à moitié commerciaux de la préparation à la naissance ou du gynéco : on nous met la pression en nous parlant de tous les risques, on nous fait peur et après on se pose en “guérisseur” de tous les maux, en “sauveur” de l’humanité, et on n’a plus qu’à adhérer. Et voilà emballé c’est pesé !
Pour la prochaine fois, on ne se laissera plus prendre, et peut être que dépasser cette impression de “je me suis fait avoir”, réagir et passer au-dessus, c’est une sacrée belle avancée dans la vie, refuser d’être à nouveau un mouton, donc grandir et devenir vraiment adulte, c’est une belle évolution dans la vie, non ?
Bref, le message c’est faites vous confiance, ca peut s’arranger lors d’un deuxième accouchement, ca peut s’arranger par les différents traitements, je connais des femmes pour qui ça a été le cas.
DELPHINE :
Tout est possible, la cicatrisation physique peut effectivement dépendre dans une certaine mesure du vécu de la blessure, mais ce que je voulais dire, c’est que la cicatrice de l’épisiotomie n’est pas que physique … Je sais pas si je suis claire … Les chairs vont facilement retrouver leurs bords, mais c’est le vécu qui demande plus de guidage pour “aborder” sereinement a son tour. Enfin c’ est ce que j’en ai compris …
Il faut beaucoup de temps, et de la réflexion, du regard vers son propre intérieur. Du temps pour SOI, et pour apprivoiser ce corps. Il me semble inutile de se presser, ou de vouloir se forcer à dire qu’on a accepté. La vie m’a montré que tout vient tout seul, que le temps fait des miracles, et qu’il existe des signes pour nous, et du positif en TOUT, y compris dans l’épisiotomie, ce que tu en garderas quand tu l’auras surmontée sera infiniment précieux en enseignement et en sérénité. N’en est ce pas, du positif, que de parvenir déjà à en parler, et à trouver des interlocuteurs attentifs? Il me semble que c’est important.
L’épisiotomie est une intrusion, une intervention extérieure, ce n’est pas parce qu’on te l’a faite subir que tu en es responsable. Ce n est pas toi qui l’a faite. Et il n’ y avait j’imagine aucune raison de la faire. Par contre, j’ai envie de dire que ce n’est pas un hasard, il y a une raison à tous les événements qui nous arrivent, une raison et une leçon à tirer de cette épisiotomie.
Pour moi, qui n’ai pas d’ enfant, mais une nièce, un neveu et quelques kilos de bébés dans les bras à mon actif, ce fut la prise de conscience de mes erreurs, le recul par rapport à ce qu’on m’a inculqué à l’école et que j’ai bêtement appliqué sans trop me poser de questions, mais toutefois en trouvant toujours assez déplacé de mettre mes doigts dans l’intimité des femmes, par exemple.
Réflexions en vrac …Sur l’interventionnisme médical inutile très souvent …
DELPHINE :
J’ai beaucoup de mal, et de plus en plus, à comprendre certains gestes, touchers, “massage” utérin post partum musclé … C’est une femme comme nous en face, je n’ai pas retenu grand chose de l’éducation de notre mère, mais ne pas faire aux autres ce que j aimerais pas qu’on me fasse, ça, oui. Une femme en proie à la douleur a le moins besoin possible que je l’embête avec des questions, des intrusions physiques … Elle vit la naissance de son enfant ….
Les “effort expulsifs” ne devraient être ni minutés, ni dirigés, seulement observés, et la femme encouragée, félicitée. Et la position gynécologique (couchée sur le dos plus ou moins relevée pieds dans les étriers) est à bannir ! ! !
Ca m’aide beaucoup ce que je lis de vous. J’étais déjà consciente de l’interventionnisme a l’hôpital …. mais j’ai tellement peur que les femmes n’insistent pas parfois …
Je n’aime pas le terme de “préparation à l’accouchement”, pourtant j’en fais. Les femmes ou couples que j’ai en face de moi s’attendent à ce que je leur apprenne à respirer, mais je leur rabâche pendant le nombre de séances où on se rencontre que rien n’est obligatoire, qu’il faut tout remettre en cause, tout demander, il faut que la personne en face justifie tout, et pas par la réponse bateau du “systématique”. Je crois que cela les fait réfléchir.
La cicatrisation en soi du périnée, physiquement, est remarquable. Mais il a une dimension tellement omniprésente dans notre identité sexuelle, que sa cicatrisation ne dépend pas que du côté physique. Je dirais que OUI, il y a une nette amélioration après le deuxième. Car après le premier, vient une prise de conscience, si ce n’était pas le cas avant, de ce fameux périnée, et naît une volonté farouche de ne pas subir à nouveau ce que tu as dû subir. Le corps d’ une femme est fait pour accoucher, pour s’étirer, sans épisiotomie. La position joue beaucoup, les efforts de poussée aussi, ton corps est fait pour pousser l’enfant à son propre rythme, c’est à dire celui qui te protégera, pas trop vite, pas “on prend de l’air on bloque on pousse trois fois pendant la contraction”. Pour le deuxième, tu as cette prise de conscience, et il faut tout faire pour devenir actrice, maîtresse de ton accouchement. A la maison, ou en structure.
RIEN n est obligatoire a l’hôpital, RIEN. C’est ce que je dis aux femmes que je rencontre.
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