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Écrit par Dorothée 23-11-2005
Au début de ma grossesse je n’avais qu’une vague idée de ce qu’était une épisiotomie. Je savais que ma meilleure amie en avait eu une assez énorme (18 points) et je dois dire que ça me faisait un peu peur. Je me suis donc dit que j’allais tout faire pour éviter d’en avoir une…
Je faisais donc beaucoup d’exercices pour essayer d’assouplir mon périnée, je me suis même achetée un ballon de gym, je me massais également souvent… Puis je me suis renseignée sur Internet, et je suis tombée sur le texte de Blandine « exercices pour éviter l’épisiotomie », intriguée j’ai fait de plus en plus de recherches, j’ai lu les études de l’AFAR… Pour moi c’était clair, je refusais d’avoir une épisiotomie puisqu’elle est inutile. Je voulais faire un projet de naissance, j’en ai parlé à mon mari qui m’a gentiment dit de faire confiance à l’équipe de la clinique, que je n’avais jamais accouché et qu’il ne fallait pas embêter le personnel médical avec ça… J’ai donc « rangé » mon idée de projet, mais j’étais fermement décidée à refuser l’épisiotomie le jour J. L’épisiotomie est devenue ma hantise…
Je désirais également un accouchement le plus naturel possible, sans péridurale et dans la position de mon choix (j’avais même envisagé un accouchement à domicile, mais je me suis heurtée au refus catégorique de mon gynécologue et de mon mari…) Par « chance », la clinique que j’avais choisie (en fait par élimination) est considérée comme la meilleure de ma ville, réputée peu interventionniste et avec une politique très favorable à l’allaitement. Ils pratiquent même la sortie précoce, ce qui m’intéressait beaucoup !
Le jour où je suis allée visiter la clinique, j’ai été agréablement surprise par la salle d’accouchement (j’ai une formation d’aide-soignante et j’ai un peu « pratiqué » les maternités) où l’on rentre sans « s’habiller », avec une table d’accouchement entièrement modulable pour choisir sa position, et une sage-femme adorable qui nous expliquait que l’on pouvait demander ce que l’on voulait au niveau de notre accouchement. J’en suis partie ravie !
Le jour J approchait… La veille, je regarde l’émission des Maternelles consacrée à l’épisiotomie, tout ce que j’entends me conforte dans mon choix de refuser ce geste…
Puis dans la nuit, à 2H00 du matin, je sens une douleur vive dans le ventre, bébé qui tourne et je perds les eaux ! Je réveille mon mari, nous nous préparons et 30 minutes plus tard nous sommes dans la voiture en route pour la clinique. Je commence à ressentir la douleur des contractions. Arrivés à la clinique, une sage-femme nous prend en charge, me pose un monitoring et m’engueule parce que je n’ai pas fait je ne sais quel examen… Bon début ! Puis elle m’examine, me dit que mon col n’est pas ouvert, qu’elle va nous installer dans une chambre et peut-être il faudra me déclencher le lendemain matin… Je demande s’il est possible d’avoir un ballon, et là elle me dit que je ferai mieux de dormir et de me reposer…
Je m’allonge donc dans le lit, mais là impossible de dormir, les contractions sont là, douloureuses, elles m’enserrent les reins ! Je tourne dans le lit, essaye de m’étirer en m’agrippant aux barreaux, je me lève, me met à quatre pattes, je vais prendre une douche chaude qui me soulage un peu… et puis je commence à vomir à chaque contraction… A 7 heures du matin, la sage-femme vient me poser un nouveau monitoring, je lui parle des vomissements et des contractions, elle me répond vaguement… ” On viendra m’enlever le monitoring dans un moment et vérifier mon col (changement d’équipe…) “.
C’est très difficile de rester couchée pendant le monitoring, j’ai affreusement mal et envie de vomir. Je me lève d’ailleurs pour vomir dans l’évier, puis on m’amène un haricot… Puis vers 8 heures une nouvelle sage-femme arrive, m’enlève le monitoring et vérifie mon col : je suis à 4 ! Pas besoin de déclenchement (non, sans blagues ?) Elle me demande si je veux la péridurale, je lui dis que je préfère m’en passer mais que je ne sais pas si je vais tenir le coup car c’est très douloureux, là elle me dit qu’on pourra essayer d’autres choses, comme de la morphine… Je suis d’accord, je demande un ballon, elle me l’amène et nous laisse… Et les contractions s’enchaînent, je prends deux douches chaudes, je vomis, je ne suis bien qu’à 4 pattes sur mon ballon, je suis dans un état second… Je râle, je crie, je feule, cette douleur… ces vomissements… les contractions sont compléments anarchiques, j’ai l’impression d’avoir très peu de répit… Je dis à mon mari d’appeler la sage-femme pour la morphine. Il appelle. Une auxiliaire répond, la sage-femme est occupée avec un autre accouchement, elle ne peut pas venir tout de suite… Noooooooon, j’ai trop mal, je veux cette aide ! Mon mari est très impressionné, j’ai des propos incohérents, je gronde de douleur sur mon ballon, il rappelle plusieurs fois, mais la sage-femme est toujours occupée… Et puis là il me dit : « Prends la péridurale, tu n’as rien à prouver, regarde-toi, c’est n’importe quoi ! » et là je craque… Oui, ok, je vais la prendre…
Il se passe encore un certain temps avant que la sage-femme arrive. Mon mari lui dit « On a changé d’avis, elle va prendre la péridurale… » Il faut donc aller en salle d’accouchement. Les 20 mètres sont très longs, plusieurs arrêts ou je m’accroche au cou de mon mari. Puis arrivée dans la salle, la sage-femme me pose une perfusion et on attend l’anesthésiste, je me souviens que je demande en combien de temps la péridurale fera effet… 5, 10 minutes… Les contractions sont toujours là, je souffle, je gère mieux… la sage-femme me rassure… je gère mieux… Puis l’anesthésiste arrive, il me pose la péridurale entre deux contractions… puis la sage-femme me rallonge, me pose un monitoring… Mon bébé bradycardise, il n’aime pas trop les contractions… La péridurale ne fait pas encore effet, les contractions s’enchaînent, et là… J’AI ENVIE DE POUSSER !!! Mon dieu, quelle sensation ! Après toutes ces souffrances, cette envie c’est comme une libération ! Mon mari appelle la sage-femme pour lui dire, elle me fait donc un TV qui est extrêmement douloureux, et là elle me dit : « Vous êtes à 8, il est presque là ce bébé, vous y étiez presque ! La prochaine fois vous pourrez faire sans péri ! »
… … …. ….
Puis la péridurale fait effet. Plus de douleur. Soulagement. Mon mari revit. Une contraction. Deux contractions. Je les vois sur le monitoring, je ne les sens plus… La sage-femme me fait mettre sur le côté pour aider le bébé… Une contraction… j’essaye de pousser pour aider mon bébé. Je lui parle. Contraction. Où est cette formidable envie de pousser ? Ou est passée cette énergie ? Je regarde mon mari, complètement désespérée : « Je ne sens plus rien, c’est complètement nul, je veux qu’on m’enlève cette m***** »
La sage-femme revient, elle injecte un produit dans la perfusion. Elle ne répond qu’à demi-mots à mes questions sur le produit… Elle gère… Le temps passe… Au bout d’un moment, elle revient. On va passer aux choses sérieuses. Elle pose les étriers, me fait remettre sur le dos, les pieds dans les étriers. Je sais que je ne veux pas. Je n’ose rien dire. Je ne contrôle plus rien. Le gynéco passe, un peu inquiet car le monitoring n’est pas très bon, le petit cœur de mon bébé ralentit pendant les contractions… Bébé est presque là, il va falloir pousser ! Je pousse sans bloquer, j’essaye encore de maîtriser quelque chose, mais la sage-femme me dit de bloquer… Je n’accouche plus, les pros sont là pour ça. Je pousse, je pousse, je sais que mon bébé va être là, je ne pense à rien d’autre ! La sage-femme se lève, revient avec un instrument bizarre, elle se penche avec entre mes jambes et fait quelque chose avec, puis elle me dit de pousser. L’auxiliaire appuie sur mon ventre. Je pousse. Je pousse. La tête est sortie. La sage-femme dit : « Ca doit être un gros bébé »… Puis une pause. Cela semble long. Comme si je voulais encore le garder en moi. Et une dernière poussée, je sens remuer entre mes jambes puis la sage-femme pose mon bébé sur mon ventre, emmitouflé dans une couverture. Mon bébé…
Il pleure. Mon bébé…
Elle coupe très vite le cordon (moi qui voulais qu’on attende qu’il finisse de battre..) sans proposer à mon mari de le faire… Puis mon mari écarte la couverture : c’est un garçon ! L’auxiliaire le prend, l’essuie un peu et lui met une couche, puis me le redonne tout contre moi. Je veux le faire téter. Il a envie lui aussi, sa petite bouche grande ouverte qui cherche ! Je demande si je peux enlever les pieds des étriers, et là…
« Non, avant il faut que je vous recouse, je vous ai fait une épisio »
QUOI ??? Le cri ne sort pas de ma bouche, mais toute mon expression doit le dire, mais quand ? Comment ? Pourquoi ? Je ne dis rien mais mon cœur est serré… Mon mari me demande ce qui ne va pas… Il sait que je n’en voulais pas…
Elle me recoud, je ne sens rien, au moins la péridurale aura été utile pour quelque chose… Je lui demande le nombre de point, elle reste très évasive. La couture est rapide. Quand elle a fini, elle m’aide à mettre mon bébé au sein, il ne le prend pas tant qu’elle essaye de lui mettre dans la bouche. Au bout de 5 minutes d’essais infructueux, elle part. Il prend mon sein, seul et tète…
Nous retournons dans la chambre après 2 heures. Je fulmine. Pourquoi une épisiotomie ? Et puis je me dis que c’était pour le bien de mon bébé, pour son petit cœur, il fallait aller vite. J’ai peur. C’était ma hantise.
Je pose des questions à la puéricultrice, comment je fais avec mon épisiotomie ? Elle aussi reste évasive, toilette au savon c’est tout, rien de particulier… On me donne des anti-douleurs. C’est supportable. Je rince avec un pulvérisateur quand je vais aux toilettes, je lave au savon.
Je veux partir vite, je veux être chez moi. Le baby blues me gagne. On m’a volé toute une partie de mon accouchement. J’ai détesté la péridurale. C’était à moi que je devais prouver que je pouvais y arriver, et je me prends mon échec en pleine figure. Je sais que c’est la péridurale qui a entraîné tout le reste.
Trois jours après mon accouchement, je vais sortir. La nuit avant mon départ, j’ai des douleurs lancinantes au niveau de ma cicatrice… Ca va passer. Je sers les dents, je ne veux pas me plaindre, je veux rentrer chez moi ! Mon mari m’a apporté une bouée. Nous rentrons.
Assez vite la douleur est devenue insupportable. Debout, assise, couchée, j’avais mal. Nous rappelons la clinique, ils disent à mon mari de venir chercher des anti-douleurs… Je les prends, mais rien n’y fait, je suis pliée en deux, je hurle de douleur, je pleure, je suis misérable, je ne peux même pas m’occuper de mon bébé. Je me raccroche à l’allaitement. Je rappelle la clinique, en larme. Ils me donnent un rendez-vous, et me disent de mettre de la glace. La glace soulage, un peu… Je ne me souviens plus exactement de l’emploi du temps, quand j’ai appelé, quand j’ai rappelé… Finalement nous retournons une première fois à la clinique, j’essaye de m’asseoir dans la salle d’attente mais je ne peux pas, j’ai mal. Une dame nous demande si nous avons rendez-vous, nous sommes très en avance. Elle nous propose d’aller directement dans le service vu mon état… Nous arrivons à la maternité, là deux puéricultrices nous voient, et me demandent ce qui ne va pas (je dois vraiment avoir une tête à faire peur) et là je fonds en larmes, incapable de parler. J’ai trop mal. La sage-femme de la consultation arrive, m’amène jusqu’au cabinet, regarde : un fil a sauté… elle touche, je me tords de douleur. Elle appelle un interne qui tarde à venir. J’ai trouvé une position ou la douleur est supportable, j’allaite mon bébé en attendant (je me sens terriblement coupable de l’entraîner dans tout ça, je suis une mauvaise mère qui trimbale son bébé de quelques jours) Puis l’interne arrive, et là l’examen est atroce, chaque fois c’est « je vous embête » et chaque fois un coup de poignard entre les jambes, je me tords, j’ai maaaaaaaaal… Il a enlevé plusieurs fils qui étaient infectés, et à fait un lavage à la bétadine. Léger soulagement. Nous repartons, avec des anti-douleurs de prescrits. Nous rentrons, mon mari va acheter les médicaments. Je lis la notice : contre-indiqués en cas d’allaitement ! Je suis en colère.
La douleur revient, pire qu’avant, je ne peux plus aller aux toilettes sans hurler, ni prendre une douche, ni marcher, ni rien faire… Nous sommes retournés 3 fois à la clinique, avec chaque fois 2 ou 3 personnes qui contemplaient mon anatomie, avec chaque fois des examens atrocement douloureux… En plus d’un « léger » abcès sur l’épisiotomie, j’avais un hématome sur la symphyse pubienne… A la troisième visite, un gynécologue à la lumineuse idée de me prescrire de la xylocaïne en gel. C’est la seule chose qui me soulagera avec de la glace. Les douleurs ont duré 3 bonnes semaines. Les premiers rapports ont été atroces, douloureux physiquement et psychologiquement. J’ai accouché il y a 6 mois, presque chaque rapport à été décevant, je ne ressens que très peu de plaisir, et je fuis ces rapports… Je ne peux m’empêcher de penser à cette cicatrice, et quand j’ose la regarder, je ne reconnais plus mon sexe, il a été mutilé. C’est laid.
Lors de la visite post natale chez mon gynéco (ce n’est pas lui qui c’est occupé de l’accouchement) sur mon dossier il était écrit que tout c’était bien passé. Pas un mot sur les suites d’épisiotomie. J’étais en colère. Je suis toujours en colère.
Je ne me souviens plus vraiment des douleurs des contractions. Je me souviens du manque que j’ai ressentit lorsque la péridurale à fait effet, cruellement.
Je n’oublierai jamais les douleurs liées à l’épisiotomie. Je n’oublierai jamais ces trois semaines où j’ai souffert et où je n’ai pas pu m’occuper de mon bébé comme je l’aurai souhaité. Je ne sais même pas pourquoi j’ai eu cette épisiotomie. Pourquoi est-ce que personne ne m’a demandé mon avis ? Comment cette sage-femme à pu se permettre de me découper le sexe sans me prévenir ? Je ressens ce geste comme un viol…
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